La défense des prévenus était d'attaque

TRIBUNAL CORRECTIONNEL MONTOIS.  Epilogue d'une soirée de violence au Peyrouat oú des armes étaient de sortieNous sommes dans la nuit du 16 au 17 juin 2002. Isaï et Petit David, deux copains du Peyrouat, déambulent dans la cité, passablement entamés par l'absorption d'alcool et de diverses drogues. Mais il leur manque une cigarette, et justement, ils aperçoivent Antoine, une vague connaissance, à sa fenêtre. « On est montés au culot », confiera plus tard Petit David. Dans l'appartement, les deux joyeux drilles liquident la bouteille de Whisky de leur hôte, et la discussion prend soudain une vilaine tournure. « On m'a proposé un portefeuille que j'ai refusé, j'avais de l'argent, j'ai sorti une liasse de ma poche » affirme candidement Isaï qui du coup fait rire tout le tribunal. La suite est moins drôle : toute la maisonnée est réveillée, un sabre est brandi, un couteau de collection lancé (il blesse quelqu'un à une aisselle), des coups de poing partent et un fusil fait son apparition en même temps qu'un chien rottweiller. Soudain inquiet, Petit David hurle « ils ont un fusil et un chien » avant de détaler par l'escalier. Isaï pour sa part saute par le balcon. Leur fuite est accompagnée de tirs de carabine délivrés par les « assiégés ». Sur place, il y a des blessés. La police est prévenue, Petit David est arrêté et son père se chargera de conduire son complice avec une certaine fermeté vers le commissariat.Devant le tribunal, le duo répond de vols avec violence en réunion ayant entraîné une ITT supérieure à huit jours sur deux personnes, et inférieure sur une troisième. Il doit également s'expliquer sur un autre vol, commis de nuit chez « Le Belge », dépouillé de son chéquier et de ses clefs de voiture pendant son sommeil : il faisait chaud et il avait laissé la fenêtre ouverte. Un gros dossier. Compliqué en ce qui concerne Isaï par un casier judiciaire abondamment garni. Les deux hommes sont détenus depuis les faits, Petit David à Mont-de-Marsan, Isaï à Pau, et tous leurs copains du Peyrouat sont venus au palais de justice leur apporter un soutien moral. L'affaire a ému tout le quartier.Devant le tribunal, les prévenus disent n'importe quoi, au grand dam de leurs défenseurs. Mme De la Chaise, qui préside, les écoute avec l'indulgence souriante du magistrat qui n'est pas dupe. Au siège du ministère public, Mme Stéphanie Ausbart ne fait pas de concessions, ces deux là sont les agresseurs, des caïds de la cité, les victimes ont sorti un fusil pour défendre les trois petits enfants qui dormaient dans la maison. « Il faut sanctionner une attaque aveugle menée avec une violence inouïe, avec l'alcool et la drogue comme facteurs aggravants. Il faut empêcher ces deux là de semer la terreur au Peyrouat, et donc, les y interdire de séjour. Et aussi les condamner, Isaï à quatre ans et Petit David à trois ans de prison ferme. » Dans la salle, les compagnes des prévenus fondent en larmes.Me Frédéric Dutin, défenseur de Petit David, a bien préparé son attaque : « Je lis le dossier, à aucun moment il n'est dit par les plaignants que mon client a eu le moindre geste violent. Donc il n'est pour rien dans la bagarre et les blessures, le dossier ne tient pas. » Me Pascale Haurie a également de quoi faire vaciller l'accusation : « On veut éliminer Isaï, on dit qu'il n'est ni curable, ni réadaptable et qu'il faut l'interdire au Peyrouat, bref on entend s'en débarrasser, je trouve cela inadmissible. C'est un grand malade, un toxicomane lourd qui se soigne depuis dix mois. Avant, personne n'a pris soin de sa santé, la seule médication que l'on a employée c'est la prison, est-ce le vrai rôle de la société ? »Le tribunal a entendu les arguments de la défense : deux ans de prison pour Isaï, dix mois pour Petit David qui peut donc sortir dès maintenant. Dans la salle, le Peyrouat ne pleurait plus, et exprimait bruyamment sa joie. « Si vous voulez manifester, allez le faire dehors », leur conseilla la présidente, soucieuse de ramener le calme dans un prétoire qui venait de respirer, l'espace d'un après-midi, le parfum de la chaude cité montoise. 

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